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Creaphis
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Paysages à petite vitesse
Martin de La Soudière
- Creaphis
- Creaphis Poche
- 11 Juillet 2024
- 9782354282066
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Écologie humaine : Une science sociale des milieux de vie
Daniel Cefaï, Olivier Gaudin, Louise Carlier, Mathieu Berger
- Creaphis
- Lieux Habites
- 28 Novembre 2024
- 9782354282103
Qu'est-ce que l'écologie humaine ? En livrant une généalogie d'un siècle de pensée écologique dans les sciences sociales et en l'illustrant par une série d'enquêtes, cet ouvrage défend trois approches complémentaires de l'étude des milieux de vie humains.
Il commence par revisiter les travaux originaires de l'écologie humaine de Chicago, quand ont été forgés, dans les années 1920,
les premiers outils d'analyse statistique et cartographique des territoires urbains et suburbains et menées les premières enquêtes
sur les relations entre groupes sociaux, nationaux, ethniques et raciaux dans les grandes métropoles. Comment des collectivités s'ancrent-elles dans des environnements naturels et les transforment-elles en milieux de vie ?
Comment s'accommodentelles les unes aux autres et comment inventent-elles de nouvelles formes d'urbanisme et d'urbanité ?
Il examine, ensuite, dans la perspective d'une anthropologie sociale, les multiples façons de rendre compte des espaces de vie
et des histoires de vie des citadins. Comment ethnographier les modes de coexistence entre ces milieux de vie ? Comment donner de la chair aux approches statistique et cartographique ? Comment reprendre, réexaminer, réappliquer et réviser, sur des terrains plus récents, les catégories de la première écologie humaine des années 1920 ?
Une série d'études de cas, de la banlieue parisienne à Los Angeles, Londres, Chicago ou Canton, démontre la fécondité de cette focale sur les milieux de vie.
L'ouvrage propose, enfin, une troisième perspective, qui combine une sémiologie et une psychologie écologiques. Centrée sur les corps des citadins et leurs champs d'expérience, elle décrit leurs façons de parcourir différentes espèces d'espaces urbains, de les percevoir et de les transformer. Elle augmente l'héritage de
l'écologie humaine par de nouveaux cheminements d'enquête sur les mouvements, les affectivités et les perceptions des citadins; et sur les exemples d'études menées à Hambourg et à Boston, elle fait comprendre les ajustements des citadins aux formes d'organisation du milieu ambiant.
Ces trois perspectives explorent, sous des angles divers, comment les sociétés humaines sculptent leurs milieux de vie.
Elles invitent à redécouvrir la généalogie de l'écologie humaine, qui a été cruciale dans les études urbaines avant de tomber dans un semi-oubli. Le pari de l'ouvrage est de réveiller et de réactualiser cette écologie humaine, de rappeler les nombreuses questions qu'elle a été la première à poser et de réfléchir sur le rôle qu'elle pourrait remplir, à l'heure où la qualité et la fragilité de nos milieux de vie s'impose comme un problème public majeur.
Cet ouvrage contient, outre deux articles inédits de Robert E. Park, une comparaison historique et internationale par Andrew Abbott des approches de la ville au Royaume-Uni et aux ÉtatsUnis, et une présentation par Jack Katz de son enquête de terrain sur la genèse et l'écologie des quartiers de Hollywood. Il propose également, pour la première fois en français, l'ethnographie pionnière de « la ville que vit l'enfant » par la psychologue allemande Martha Muchow, en 1935.
Ses présentations intermédiaires en font un utile manuel de synthèse sur différents épisodes de la sociologie de Chicago et de l'histoire de l'écologie humaine en sciences sociales.
Le livre se clôt, enfin, sur une mise en perspective de cet héritage à l'épreuve de la nouvelle écologie politique qui émerge dans les années 1960 et 1970. -
Ex post : Une critique de l'architecture habitée
Jean-Michel Léger
- Creaphis
- Lieux Habites
- 9 Janvier 2025
- 9782354282004
Dans " Ex post ", trente ans après la parution de
Derniers Domiciles connus, (Créaphis, 1990) le sociologue Jean-Michel Léger revisite des logements avec architectes. Il s'agit d'une observation et une analyse d'un phénomène modélisé (conception architecturale et urbanistique) et une mise en oeuvre pour mesurer des éventuels écarts après la réalisation du phénomène observé.
Retour sur expérimentations
" Ex post " s'oppose à l'expression " Ex ante " qui enregistre les variables prévisionnelles d'une économétrie avant la réalisation.
Cet " Après les faits " se présente à la fois comme une enquête très poussée sur une dizaine d'opérations caractéristiques des années 1990-2010 en matière de mise en oeuvre du logements dans des contextes sociaux et territoriaux français très différenciés et une réflexion plus large suggérant un point de vue critique de la théorie architecturale au sein d'un moment particulier de l'histoire . Une époque qui se signale aussi comme celle des derniers feux d'un
âge d'or de la créativité architecturale. Le sociologue de l'
Usage (voir son ouvrage sous ce titre aux éditions de la Villette) qu'est Jean-Michel Léger, l'un des plus fins spécialistes de l'habitat qui, depuis son poste d'observation et de recherche du CNRS, principalement installé dans l'école d'architecture de Paris-Belleville, n'a cessé de mener l'enquête auprès de l'ensemble des acteurs de la chaîne de l'habitat (habitants, maîtres d'ouvrage, maîtres d'oeuvre, architectes, aménageurs).
Sociologie et architecture
Au croisement de l'architecture et de l'usage, le logement est en effet un bien culturel, au-delà de son statut de bien économique et immobilier, fût-il essentiel pour la société comme pour la vie quotidienne des ménages. Or la question du logement est revenue à l'agenda politique, les effets de la pandémie du Covid-19 ayant souligné l'inadaptation des logements à la pratique du télétravail mais, plus largement, l'inadéquation de logements trop petits, trop chers et mal construits.
Le livre très argumenté et très bien documenté ne se contente pas d'exposer quelques brillantes expérimentations architecturales, il les confronte à leur usage par leurs habitants, en interrogeant donc à travers l'expérience architecturale, les notions d'intention, d'invention, d'appréciation et de critique. Sont ainsi passées au crible des opérations conçues par des architectes français et étrangers.
Mise en abyme
Ne faut-il pas évaluer aussi l'évaluation elle-même, sans sombrer pour autant dans l'obsession maniaque d'une spirale évaluative sans fin ?
Au terme de ce voyage à travers les retours d'expérience, l'écart entre l'évaluation et la critique ne s'est-il pas réduit ? Que reste-t-il de la différence entre la prétendue objectivité de la première et la soi-disant subjectivité de la seconde à réaliser.
Certains chercheurs appelaient à une objectivation de la critique : ici Jean-Michel Léger propose l'inverse : une subjectivation de l'évaluation. En toute logique, les deux démarches devraient se croiser et même fusionner les savoirs et les acquis de l'une et de l'autre : connaissance théorique et culture de la première, méthode et épreuve du réel de la seconde. Peut-être est-ce à cette condition que les attendus de l'évaluation critique seront mieux respectés et suivis par les politiques comme par les praticiens, par les maîtres d'ouvrage comme par les architectes pour le plus grand bien commun des habitants.
L'ouvrage explore ainsi des franges sensibles entre intimité et urbanité, individuel et collectif, aménagement personnel et nécessité d'appliquer les règles d'un art de vivre ensemble. Sans angélisme et sans condescendance le travail critique de Jean-Michel Léger intègre des notions d'habitabilité " habitante ", d'esthétique, d'économie, d'adaptabilité et de durabilité en analysant " à tous les étages " et côté cour comme côté rue, les effets et les écarts entre projet et réalisation, conception et réception. -
L'essai au cinéma : De Chaplin à Godard
Bamchade Pourvali
- Creaphis
- Creaphis Poche
- 9 Novembre 2023
- 9782354281984
S'il s'accomplit dans les années 1960, à travers les longs métrages de Chris Marker et de Jean-Luc Godard, la forme de l'essai au cinéma possède une longue histoire. Les deux modernités qui apparaissent avec la seconde guerre mondiale, celles d'Orson Welles et Roberto Rossellini, annoncent les deux catégories de l'essai au cinéma : l'essai documentaire et l'essai de fiction.
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Ce livre présente les choix de Pierre-Jean Amar, lui même photographe, parmi les images très nombreuses de la Chine photographiée par les photographes de l'agence Magnum depuis 1945. Certaines de ces images sont très connues, beaucoup sont inédites.
L'ouvrage accompagne l'exposition de la Communauté de communes d'Aix-en-Provence.
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Twenty twenty : petites traversées franco britanniques
Elise Hugueny-Léger
- Creaphis
- Format Passeport
- 29 Août 2024
- 9782354281908
Pour connaître une ville, pour la comprendre, il faut passer par sa gare routière. Élise Hugueny-Léger livre le récit de l'entre-deux permanent, entre un pays, la France, et un autre, le Royaume-Uni, entre deux cultures, deux manières de parler, de lire, d'entendre, d'écrire ou encore de rêver, mais aussi entre le monde extérieur et celui des pensées et des souvenirs.
Peut-on vivre dans une bulle et ressentir malgré tout les pulsations du monde, sans la faire éclater ? Cette question posée par l'auteure de cet ouvrage résume sans doute sa contradiction interne à travers un récit de l'entre-deux permanent, entre un pays, la France, et un autre, le Royaume-Uni, entre deux cultures, mais aussi entre le monde extérieur et celui des pensées et des souvenirs.
Sous l'allure d'un petit journal intime ou récit de vie d'une femme de quarante ans, Élise Hugueny-Léger, à la double appartenance et au parcours de vie découpé, Twenty Twenty abrite une réflexion sur le quotidien, celui de l'auteure mais aussi sur le quotidien de millions de Français et de Britanniques du XXIe siècle et de ses crises importantes. Une sociologie des actualités des années 1980 à 2020 se déploie à travers un regard singulier et unique qu'est celui de cette femme partagée entre deux espaces et deux temps, habitant le monde à sa façon, au gré de ses pérégrinations entre la France et le Royaume-Uni, leurs deux manières de parler, de lire, d'entendre, d'écrire ou encore de rêver, en regardant défiler les paysages par la vitre du train. Le paysage n'est jamais que du temps qu'on parcourt avec les yeux.
La narratrice semble en effet parcourir le monde physiquement, spirituellement, et par la linguistique avant tout : la notion de jeu linguistique est très présente par le passage fréquent de l'auteure d'une langue à une autre. Comment faire entendre en français des phrases, sonorités, tournures britanniques, et à travers elles, une vie sociale, des habitudes, une culture ? Le lecteur est alors interrogé sur le fait d'être étranger , de se sentir étranger au sens où même installé quelque part on le demeure ; c'est en partie un texte qui parle d'émigration et immigration, de n'être jamais tout à fait chez soi ou chez l'autre. L'auteure forme presque une troisième langue propre à la manière d'appréhender le monde quand on est entre deux pays.
Notons que le stream of consciousness , visant à dépeindre les innombrables pensées et sentiments qui traversent l'esprit d'un narrateur selon Daniel Oliver, raconte précisément ce mode narratif utilisé par l'auteure qui ne cesse de confondre ses pensées ou ses souvenirs dans ses itinérances en un flux de conscience traduit par les mots. Pour connaître une ville, pour la comprendre, il faut passer par sa gare routière. Les mots, seule forme permanente de la pensée, survivent au temps et à l'espace.
Words so I don't fall. L'auteure semble s'y accrocher et y suspendre des voyages et des rencontres, des morceaux de vie bien réels, pourtant toujours ailleurs. -
En 1968, un barrage est construit dans le resserrement d'une vallée, noyant 700 hectares. De nombreux habitants doivent quitter leur terre. Antoine Picard a enquêté auprès des habitants et des spécialistes de la vallée du Salagou. Son récit documentaire fragmentaire où toutes ces paroles et empreintes visuelles cohabitent dessine la complexité du territoire et de son histoire.
Le ruisseau serpente au milieu de la ruffe, une roche sédimentaire rouge, au coeur d'un territoire très sec. La viticulture domine. Dans les années 1950, les pouvoirs publics préconisent d'arracher les vignes et de planter des vergers. Ils anticipent la nécessité de créer un réservoir d'eau pour l'irrigation des fruitiers prometteurs.
En 1968, le barrage est construit et le site est mis en eau. De nombreux habitants quittent leur terre mais la montée des eaux n'atteindra finalement jamais le niveau prévu. Le village a été évacué pour rien. Dans les années qui suivent, les maisons sont pillées, tombent en ruine. Des grillages protecteurs assurent la sécurité du site. D'anciens habitants luttent. Ils veulent que leur village revive. Ils restent mobilisés durant cinquante ans. En 2019, trois nouvelles familles s'installent. Le hameau, proche du barrage, aurait lui aussi dû être inondé. Il n'a pas eu la même chance : il est rasé, à l'aube, un matin de 1986.
Pendant trois années, Antoine Picard a enquêté auprès des spécialistes (géologue, botaniste, biologiste, pêcheur, plongeur, agriculteur...) et des habitants (nouveaux arrivants et autochtones) de la vallée du Salagou. Il a développé un récit documentaire fragmentaire où toutes ces paroles et empreintes visuelles cohabitent pour dessiner la complexité du territoire et de son histoire. Il s'est inspiré de faits réels et situés, pour atteindre une dimension universelle qui résonne en chacun de nous, faisant référence à nos histoires familiales, à leur enfouissement dans nos mémoires, et paradoxalement à leur présence toujours saillante. Le paysage devient la métaphore des transformations intérieures, des secrets et des transmissions inconscientes. -
Leone Ginzburg : un intellectuel contre le fascisme
Florence Mauro
- Creaphis
- 29 Septembre 2022
- 9782354281786
À la fin des années 1920 à Turin s'était formé un groupe de jeunes, au lycée d'Azeglio et ensuite à l'université. Leur maître Augusto Monti disait qu'il leur enseignait Dante et la politique. Les élèves se nommaient : Leone Ginzburg, Cesare Pavese, Noberto Bobbio, Massimo Mila, Vittorio Foa, Mario Lévi.
Leone Ginzburg (1909-1944) est apparu très vite comme la figure émergeante de ce groupe par son attitude morale exemplaire, tant sur le plan intellectuel que politique. En 1933 il fonde, avec Giulio Einaudi et Cesare Pavese, les éditions Einaudi : en 1937 et 1938, il y installe les grandes collections, historiques, scientifiques, et les traductions de la littérature européenne : lui-même, d'origine russe et russophone, traduit les auteurs russes ou révise des traductions (Gogol, Tolstoï, Pouchkine, Dostoïevski, Tourgueniev) tandis que Cesare Pavese traduit les textes les plus novateurs de la littérature américaine (Sinclair Lewis, Herman Melville, John Dos Passos, Gertrude Stein...). De 1941 à 1943, condamné par le régime fasciste à la relégation dans un petit village des monts des Abruzzes, il écrit sans cesse pour la « Casa » Einaudi, et exige l'excellence du travail éditorial. Dans une incessante revendication de ses positions antifascistes, Ginzburg est mort de sa radicalité en 1944, à la prison romaine de Regina Coeli, assassiné par les nazis.
Avec une écriture impliquée, Florence Mauro raconte la vie de Leone Ginzburg tirée comme un trait droit et sans bavure, sans aucune compromission, marquée par l'exigence intellectuelle. Par sa lutte jamais relâchée pour la liberté d'écrire, de traduire, d'enseigner, de transmettre, il a contribué à maintenir un rempart indispensable contre la montée d'une société totalitaire. L'autrice remet en lumière son intransigeance et sa radicalité face aux événements contemporains de sa génération. Il est un modèle qui parle aujourd'hui et enseigne à ne pas manquer de vigilance.
Elle transmet au lecteur d'aujourd'hui son empathie pour le personnage de Leone Ginzburg qui devient par moments héros de roman : elle l'imagine dans une quotidienneté, avec ses camarades de lycée dans les cafés de Turin, ou avec sa famille dans le confino des Abruzzes où il est exilé par le pouvoir fasciste. Elle le met en scène, se fondant sur des écrits retrouvés, des témoignages, des archives. Elle décrit ses enquêtes dans les archives à Turin et à Rome, ses déambulations sur les pas de Leone Ginzburg, ses rencontres avec des témoins ou des historiens.
À travers le geste d'écriture, Leone Ginzburg inscrit la culture comme premier front de l'antifascisme. Pour lui tout acte de langage devient acte politique.
Comment des articles écrits dans la célèbre revue La Cultura - reprise par la Casa Einaudi - apparaissent-ils comme les mots les plus engagés de la Résistance ? Comment la Casa Einaudi est-elle au coeur, dès sa création, d'un des enjeux essentiels de la démocratie, du renouvellement d'un patrimoine qui a fondé un pays, et de sa très nécessaire leçon de résistance à venir ?
Il est à noter que l'épouse de Leone, Natalia Ginzburg, née Natalia Levi, a été une grande écrivaine.
Leone et Natalia ont eu trois enfants dont Carlo Ginzburg le célèbre historien pionnier de la micro-histoire et historien de l'art. -
Playlist est une exploration des affects provoqués par la musique ou, plutôt, par les souvenirs de ces affects, par la mémoire involontaire qui ressurgit à l'écoute. 100 disques - datant de 1967, année de la naissance de l'auteur, jusqu'à 2017, année de ses 50 ans - sont évoqués dans de courts textes en prose mesurée.
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Demandez le programme ! : Une histoire du cinéma (1894-1930) par les programmes des lieux de project
Laurent Mannoni
- Creaphis
- Foto Creaphis
- 4 Janvier 2024
- 9782354282011
Comment le cinéma muet était-il vu, en son temps ? Avec cet ouvrage, l'étude de l'expérience des spectateurs s'enrichit d'une analyse détaillée des programmes de cinéma, dans leur contenu et dans leur matérialité. Des feuilles imprimées les plus modestes aux merveilleux livrets du Gaumont-Palace, ces documents témoignent de la culture matérielle de l'époque (1894-1930).
Comment le cinéma muet était-il vu, en son temps ?
Avec cet ouvrage, l'étude de l'expérience des spectateurs s'enrichit d'une analyse détaillée des programmes de cinéma, dans leur contenu et dans leur matérialité. Des feuilles imprimées les plus modestes aux merveilleux livrets en couleurs du Gaumont-Palace, de l'affichette foraine à la brochure de style Art déco, ces documents témoignent de la culture matérielle de l'époque (1894-1930).
Au croisement des arts visuels et des techniques publicitaires, ils reflètent l'extraordinaire variété du cinéma des premiers temps, tenu pour un spectacle vivant, une " attraction ". Les projections, avec leurs accompagnements musicaux, prenaient place en ville ou au dehors des centres urbains. Outre les salles des quartiers populaires ou bourgeois, les programmes évoquent d'autres intérieurs : baraque foraine, café-concert, music-hall, salle de théâtre. Ces sources d'une exceptionnelle qualité, jusqu'ici peu étudiées, font apparaître en creux le public de l'époque du muet, ses sensations et ses émotions, individuelles et collectives.
SOMMAIRE
Rencontre entre Jean-Jacques Meusy et Laurent Véray
Retour aux sources
Laurent Mannoni
Essai de typologie des programmes de cinéma, 1896-1930
laurent guido - Du music-hall au cinéma, le programme comme modèle spectaculaire
Jean-Marc Leveratto, Fabrice Montebello, Pierre Stotzky
Le café et la mise en forme du loisir cinématographique dans la France de la Belle Époque
Francesca Bozzano
Pierre Sarrus et les tournées du Ciné-Phono-Scène dans le Sud-Ouest de la France durant les années 1910-1920
Martin Barnier
Les sons du cinéma muet à travers les programmes. Des séances de forains jusqu'aux salles spécialisées
Laurent le Forestier
Marchés et modes de consommation des films en France : considérations méthodologiques
Laurent Véray
Montrer des films en 1915-1918. Études de deux séries de programmes caractéristiques du spectacle cinématographique de la période
Emmanuelle Champomier
Les programmes des salles de cinéma dans la presse française des origines à la fin des années 1920
François de la Bretèque
Loin de Paris : les programmes dans la presse quotidienne régionale et les hebdomadaires locaux de l'Hérault entre 1908 et 1920
Annie Fee
L'évolution artistique du cinéma à travers les programmes et les cartons d'invitation des années 1920
Carole Aurouet
La " revue-programme " du Studio 28 : une archive de salle et un manifeste surréaliste pyrogène
Maurice Gianati
Un ciné-club d'avant-garde dans les années 1930 : les Amis de l'Art cinématographique de Liège -
Martin de la Soudière est ethnologue. Il est l'auteur d'un texte dans un livre collectif paru chez Créaphis en 2002, L'Ile Carn. Rencontres en bordure du temps. Il sillonne depuis des années la Lozère, le Cantal, le Massif central, ses terrains d'enquêtes. Il s'interroge les cultures paysannes, les espaces ruraux, l'environnement, le climat. Ses diverses publications, ouvrages ou articles scientifiques rendent compte de ses recherches en anthropologie sociale.
Il propose ici, plus modestement, un voyage "ethno-poétique ", à travers ces lieux ordinaires, qui lui sont familiers depuis l'enfance et par ses enquêtes, " lieux de rien du tout, à mi-chemin du haut-lieu et du non lieu " écrit Gilles Lapouge dans sa préface. Des Pyrénées à l'Auvergne, de la Creuse à l'Ardèche et aux Alpes, ces lieux sont reliés par des sentiers, des petites routes et un réseau de lignes de chemin de fer, dites lignes secondaires, aujourd'hui partout menacées de disparition, qui sont le refrain de ces pages et l'entrain de ce livre.
Martin de la Soudière, né en 1944, est ethnologue (chargé de recherche) au CNRS. Il mène des recherches en Lozère, Cantal, dans le Massif central et dans le haut Jura, sur les cultures paysannes, les espaces ruraux, l'environnement et le climat. Il a été rédacteur-en-chef de la revue Ethnologie française -
Écologies visuelles de Los Angeles : De Reyner Banham aux séries contemporaines
Sophie Suma
- Creaphis
- Creaphis Poche
- 25 Janvier 2024
- 9782354281946
Ce livre ouvre une discussion à propos des motifs visuels les plus reproduits pour figurer l'espace de Los Angeles dans les productions audiovisuelles, à la télévision et sur les écrans.
Que l'on soit immobilisé à la maison à cause d'une jambe dans le plâtre comme Jeff Jefferies dans
Fenêtre sur cour, ou que l'on soit enfermé chez soi et contraint d'observer sur un écran son pays frappé par une pandémie, voir le monde à travers une fenêtre n'a jamais pris autant de sens qu'aujourd'hui. Mais si nous pouvons " voir à distance " pouvons-nous réellement " prendre de la distance " sur les images que nous voyons ? Par exemple, que nous disent les séries dont elle est l'héroïne de Los Angeles et de ses habitants ? Existe-t-il une culture visuelle angeline ? Les multiples images dont elle est l'objet depuis plusieurs décennies font circuler des motifs récurrents. Ces derniers participent d'un certain regard porté sur la ville qui n'est pas sans poser quelques conflits idéologiques. Diffusées en masse, certains d'entre-eux renforcent les stéréotypes urbains, mais aussi sociaux. Transmédiatiques, ces motifs se comportent comme des organismes autonomes qui forment des écologies visuelles. En s'appuyant sur l'approches écologiques de l'historien anglais Reyner Banham, ce livre ouvre une discussion à propos des motifs visuels qui dominent pour figurer les espaces physiques et sociaux de Los Angeles à la télévision et sur les écrans. Et vise à identifier quelles sont les contre-visions imaginées comme des alternatives aux lieux communs, comme des fictions émancipatrices de Los Angeles. -
Hervé Guibert, l'envers du visible
Vincent Jacques, Claire Pagès
- Creaphis
- 8 Décembre 2022
- 9782354281809
Écrivain mondialement connu, surtout après la publication de A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie (Gallimard, 1990), mais aussi photographe, critique, scénariste, cinéaste, Hervé Guibert (1955-1991) n'a cessé de questionner les images.
« Ceux qui se livrent à l'écriture, sans doute, ne peuvent plus écrire comme autrefois, du temps d'avant l'image photographique, télévisuelle, cinématographique ». Écrire sur l'image, son rapport à la mort et au désir tout en y tissant une trame autobiographique sera le propre de son livre L'Image fantôme (Minuit, 1981). Dans Des aveugles (Gallimard, 1985), les mêmes thèmes sont explorés à partir de l'envers du visible. Dans toute son oeuvre, Guibert a travaillé sur l'envers des images et sur les ficelles cachées des marionnettes du réel (aveuglement, incognito, faussaires, fictions, leurres, fantômes, cires anatomiques, etc.) sans jamais réduire le visuel au vu ou à l'aperçu et en donnant tout son sens à la notion de visible. D'un autre côté, sa pratique de photographe, par exemple dans Suzanne et Louise, un roman-photo sur ses deux tantes (1980, 2005 et 2019), se confronte sans cesse à l'écriture.
Le livre, sur une idée des philosophes Claire Pagès et Vincent Jacques, réunit une dizaine de contributions et entretiens sur la question du visible dans l'oeuvre (littéraire, photographique, cinématographique, critique) d'Hervé Guibert.
Entre fantasmagorie et documentaire, comment définir l'écriture hybride de Guibert ? Si l'écrivain s'est interrogé sur la spécificité photographique à l'égard de la tradition picturale, explorant la dimension du reportage, nous pouvons questionner en retour la particularité de l'écriture en lien avec l'image photographique.
On a beaucoup écrit sur l'écrivain, un peu moins sur le photographe : la thématique transversale de cet ouvrage permet d'aborder différemment l'oeuvre littéraire, mais aussi de la saisir comme pensée de l'image et de la situer dans le contexte de la réception de son oeuvre. -
Dante en paysages
Bernard Chambaz, Florence Hinneburg
- Creaphis
- Format Passeport
- 9 Mars 2023
- 9782354281892
C'est à un
Dante " pas à pas " que nous invite le poète et essayiste Bernard Chambaz en suivant, dans une sorte de double fascination pour l'Italie de Dante et pour l'oeuvre gravé de l'artiste contemporaine Florence Hinneburg, un " retour aux sources ".
C'est à un
Dante " pas à pas " que nous invite le poète et essayiste Bernard Chambaz en suivant, dans une sorte de double fascination pour l'Italie de Dante et pour l'oeuvre gravé de l'artiste contemporaine Florence Hinneburg, un " retour aux sources ". Deux prétextes qui lui servent à la fois de motif, de mobile et moteur pour ce texte d'une grande liberté de ton, en prise directe avec une actualité de notre temps et l'intemporalité de l'oeuvre de Dante. Texte libre mais qui ne cède en rien à une érudition assumée, vécue de l'intérieur, en toute subjectivité. Texte tout aussi sensible que savant. En remontant le temps et en revivant à rebours ses propres lectures de Dante, conscient de l'éblouissement que lui procurent les tracés et les hachures des " défets " de Florence Hinneburg, il ouvre un chemin et cherche des passages entre les deux Florence (l'artiste et la ville de Toscane). Cette quête lui donne l'occasion de revisiter ou du moins de revoir mentalement les lieux à travers les indices et les traductions qui ont jalonné la fabrication de la
Divine Comédie et de son illustre auteur à travers les siècles. Le " portrait de Dante en paysage " réalisé ainsi à quatre mains par l'écrivain et l'artiste fourmille de détails (Chambaz n'oublie pas de mentionner à plusieurs reprises le célèbre bonnet rouge) s'établit ainsi dans une sorte d'interférences ente le texte et les images que renforcent les citations extraites de la
Divine Comédie comme une double invitation à découvrir (pour y mieux recourir) le grand poète florentin, emblème littéraire de l'Italie. -
Petite philosophie pratique de la prise de vue photographique
Jean-Christophe Béchet, Pauline Kasprzak
- Creaphis
- Creaphis Poche
- 19 Juin 2014
- 9782354280864
(Texte provisoire)
Au cour de l'acte : le cadrage
Champ/hors champ
Règles de composition
Prévisualisation du réel
Recadrage/recomposition : jusqu'où aller ?
L'instant décisif ?
L'appareil : outil ou instrument ?
Les cerveaux électroniques
Art et industrie
Comment choisir ses photos : l'éditing
Les différents temps de la photographie
Un art matériel
Quel format, quel support ?
Le rapport au réel
La photographie dans le marché de l'art
La notion d'original
Professionnel, amateur, artiste : quelles différences ?
Depuis cent cinquante ans, l'industrie photographique n'a cessé de se développer en lien avec l'essor de la " civilisation de l'image ". Le geste de " prendre des photos " est devenu une pratique courante et banale, en apparence d'une grande simplicité. Pourtant l'acte photographique est plus complexe qu'il ne paraît. En tant qu'usage social, il se situe entre technique et art, consommation et création, normes et marges.
Le photographe Jean-Christophe Béchet et Pauline Kasprzak, en philosophe, interrogent la prise de vue sous la forme d'un dialogue, confrontant " théorie " et " pratique ".
L'entretien s'articule autour de plusieurs questions déclinées en courts chapitres : cadrage/composition, avant/après, l'appareil, l'éditing, la matière, le réel et le marché de l'art. -
Si l'expression-titre Rions noir de cet ouvrage fonctionne comme une sorte d'oxymore comme dans celle, voisine, du « rire jaune », elle n'en constitue pas moins, par le jeu du déplacement des lettres, une anagramme pour peu qu'on ajoute un s à noir.
En tout cas « ça grince » pas mal dans les rouages de cette petite machine graphique et littéraire. Et en même temps tout tourne avec une force tranquille. Le livre réunit « sous vide » 16 textes inédits de Daeninckx auxquels ne répondent pas directement mais de manière subtile les séquences de dessins inédits de Jordan (une centaine au total).
Les textes sont des courts tableaux de scène de la vie quotidienne en divers endroits à la ville et à la campagne, des récits à caractère documentaire, des fenêtres sur l'histoire directement contemporaine des sociétés. Les dessins ne sont pas au contact direct des textes mais, sans correspondance ostentatoire, ils conservent leur valeur d'équivalence (dessins d'humour piquants) et leur unité de style (l'encre de Chine se traduit en imprimerie dans une symphonie de noirs profonds). Le livre est dominé par une triple dimension artistique, littéraire et politique. Il est tantôt cri tantôt murmure, il se caractérise par une forme qui est aussi un engagement graphique et une conception éditoriale qui rend hommage à deux auteurs habitués à mener des combats de longue date.
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Des philosophes sur le terrain
Christiane Vollaire, Olivier Razac, Sophie Djigo, Isabelle Delpa
- Creaphis
- Creaphis Poche
- 24 Novembre 2022
- 9782354281878
Ce livre est né de la volonté d'interroger quatre pratiques différentes de la philosophie de terrain, c'est-à-dire d'un rapport empirique de quatre chercheurs aux situations concrètes à partir desquelles la pratique de l'entretien ou de la relation va leur permettre de questionner un certain nombre de réalités sociales et politiques contemporaines.
Si le terrain appartient traditionnellement aux méthodes des sciences sociales, la philosophie contemporaine, depuis les années 2000, a commencé à le réinvestir. Et les quatre auteurs font partie de ceux qui revendiquent, de façons diverses, une telle entreprise. C'est cette diversité même qui les a poussés à se réunir.
Cet ouvrage ne vise donc pas à homogénéiser leurs pratiques, mais au contraire à en faire valoir l'hétérogénéité, c'est-à-dire la richesse et la pluralité que peut engager un rapport philosophique au terrain. Ce livre ne risque pas non plus d'épuiser une telle hétérogénéité : bien d'autres rapports philosophiques au terrain sont possibles, et actuellement réalisés par d'autres qu'eux.
Enfin ils souhaitent, sous un format relativement court et accessible, présenter directement la manière dont, chacun, ils ont été plongés dans le terrain, travaillés et questionnés par lui avant même de pouvoir le questionner eux-mêmes, à partir de quatre champs d'investigation différents :
- une réalité sociale reconfigurée par l'impact politique des migrations dans le Calaisis - une réalité judiciaire dans les configurations internationales de la guerre en ex-Yougoslavie - une réalité pénitentiaire pensée à partir de ses acteurs en France - une réalité d'engagements à partir de la situation économico-politique de la Grèce.
Ces quatre champs d'investigation suscitent eux-mêmes quatre modes d'approche différents :
- l'immersion - l'observation combinée aux entretiens et au travail d'archives - l'enquête par le biais de la position enseignante - l'association des entretiens à la réflexion esthétique.
Leur petit nombre réfute évidemment toute volonté d'exhaustivité. Et le caractère singulier de chacun de leurs terrains dit qu'ils ont souhaité embarquer le lecteur dans quatre aventures intellectuelles différentes, questionnant chaque fois le rapport de la philosophie au terrain par des abords spécifiques et renouvelés. En se réunissant, ils ont souhaité à la fois attester de cette pluralité à partir du récit de l'analyse de chacune de leurs expériences, et en dégager ce qui les lie à cette constellation commune qui a pris le nom de philosophie de terrain. -
Ce petit livre condense sous la forme d'un manifeste une réflexion inédite sur la " philosophie de terrain ".
Si toute philosophie se définit en partie par son rapport à l'expérience, tous les philosophes ne placent pas ce rapport au centre de leur travail. Avec le projet d'une philosophie de terrain, Christiane Vollaire interroge cette relation en détail. Elle en propose une analyse informée par ses propres expériences, développe une réflexion originale sur l'ancrage des pensées philosophiques dans leur contexte historique et présente une approche critique et politique singulière de l'activité des philosophes. Plutôt que par l'ambition théorique ou généralisatrice, sa démarche se définit par une écriture attentive à l'expérience concrète du déplacement (géographique ou de classe, comme le pratiquait Simone Weil) et par une politique de l'entretien. Celle-ci procède de l'écoute et de la restitution des paroles des personnes rencontrées sur place, dans les lieux où elles vivent, partagent des expériences et s'organisent pour faire face à des situations d'épreuve politique. En Égypte, au Chili, en Bulgarie, Christiane Vollaire a mené des entretiens qui rendent compte du discours et de la pensée accomplis par les sujets eux-mêmes. À rebours de leur réduction fréquente au statut de subalternes, de victimes ou de témoins, il s'agit de les tenir pour acteurs de l'histoire et penseurs d'une expérience commune.
L'intention de cette philosophie de terrain est, selon l'expression de Michel Foucault, de fournir des " outils " pour penser de façon critique les migrations, les systèmes de santé et d'éducation, la question du travail, les politiques du logement, le droit ou les politiques pénales, les politiques mémorielles, etc. Le travail de documentation et la mise en forme par l'écriture s'articulent à une réflexion détaillée sur la relation de l'esthétique au politique, dans un ouvrage à valeur de manifeste qui souhaite avant tout ouvrir des pistes de réflexion et susciter des collaborations. -
L'ouvrage est un essai d'histoire sur le photographe allemand August Sander (1876-1964) à travers son oeuvre et à travers sa vie. Essai d'histoire de l'art, d'histoire technique et aussi d'histoire sociale. C'est bien d'un artiste de son temps et dans son temps, un artiste d'Allemagne mais à l'envergure universelle dont Daniel Challe entreprend le « portrait dans le portrait » : il regarde les Hommes du XXe siècle à travers le regard du photographe. Ce corpus d'images peut être sans cesse réinterprété, réinterrogé, analysé et remonté.
August Sander, artiste exceptionnel et à la trajectoire exceptionnelle, a construit une grande oeuvre malheureusement tronquée par la disparition de milliers de négatifs en 1944. Reconnu de son temps, comme lors de cette exposition très importante de 1927 à la Kunstverein de Cologne, il affirme alors, comme la ligne de conduite de toute son entreprise, ce qui sera sa formule la plus célèbre : « Voir, observer, penser. » Il y a dans le « système Sander » une intention encyclopédique à travers une typologie et une topographie (il reste ancré dans sa région de Cologne qu'il arpente avec méthode), une grande leçon de modestie, d'objectivité (que Daniel Challe décrit à travers l'évolution d'une sensibilité artistique conduisant l'artiste des premières approches pictorialistes à la Nouvelle Objectivité), une conduite jamais coupée de son époque et des influences artistiques et politiques. Musiciens, écrivains, architectes et acteurs posent pour le photographe qui commence à travailler au grand projet artistique de sa vie. Ce regard « objectiviste » sur la réalité sociale de son époque - à partir d'un inventaire à teneur sociologique des types humains, des différentes classes et catégories socioprofessionnelles - est réuni dans son livre de 1929 Antlitz der Zeit (Visages d'une époque) très bien accueilli à sa sortie.
De la même façon et avec la même rigueur technique August Sander observe le paysage qui l'environne dans l'Allemagne de son temps. Sa recherche porte sur les liens existant ou pouvant exister entre les humains et l'environnement de différentes régions de son pays. L'arrivée des nazis marque un très violent et douloureux tournant dans la vie et l'oeuvre du photographe et de sa famille : l'un de ses fils est emprisonné et meurt en 1944 ; la même année une grande partie de ses négatifs est détruite dans un incendie. Malgré cette brisure irréparable il continue son travail qui atteint une nouvelle reconnaissance internationale en Allemagne et aux États-Unis.
Daniel Challe analyse cette trajectoire avec sous tous ses aspects y compris les moins connus et présente avec la même clarté les contextes d'émergence des portraits, des paysages et des études botaniques en rendant ainsi justice à l'esprit de la démarche du photographe. Il met ainsi en valeur l'universalité du langage photographique. L'auteur convoque toutes sortes de sources et d'éléments comme des extraits des conférences radiophoniques sur la photographie que Sander a donné régulièrement dans les années 1930 mais aussi des auteurs, des historiens, des spécialistes de l'Allemagne contemporaine de Sander et des penseurs de la photographie (comme Simone Veil, Chris Harman, Philippe Artières, Olivier Lugon ou encore John Berger et Roland Barthes).
Daniel Challe engage aussi sa propre réflexion sur son temps, soucieux de monter en quoi la « cosmogonie » Sander a laissé une empreinte durable non seulement dans l'histoire de l'art photographique mais aussi dans les pratiques artistiques contemporaines. Cet art documentaire, à mettre en relation avec celui des photographes français (comme Eugène Atget) ou américains (comme Walker Evans), continue d'exercer une influence considérable sur les jeunes générations de photographes.
L'approche de Daniel Challe est originale en ce sens qu'il est lui-même photographe et que sa réflexion personnelle est motivée par un retour sensible sur sa propre pratique, sans pour autant développer la moindre référence à son propre travail ni à son métier d'enseignant.
Il dit lui-même, en justifiant son désir d'écriture : Le livre de Sander est donc non seulement un document d'histoire, mais aussi une utopie. Utopie d'une autre Europe : celle dont nous sommes nombreux à rêver mais que nous ne voyons pas advenir. [...] Un photographe, un pays, c'est un beau programme pour écrire l'histoire, pour raconter ce qui me touche dans cette oeuvre photographique plus que dans aucune autre. J'ai essayé de me tenir modestement à ce fil. -
L'art de tremper : manuel à l'usage des Français et des étrangers qui trempent
P. F. Roy
- Creaphis
- 31 Août 2023
- 9782354281816
Tremper serait-il une spécificité française de l'art de se mettre à table pour le petit déjeuner, le goûter ou le souper ? Que signifient " tremper sa chemise ", " tremper la soupe ", un acier " trempé ", prendre une " trempe " ? Exercice littéraire jubilatoire, foisonnement baroque sur un geste quotidien, un presque rien appétissant où les mots se savourent.
" Alors que nous quittions la cuisine, George posa sa dernière question :
-; Is there any book about dipping ?
Qu'il ne se soit pas exprimé en français, langue qu'il parle couramment, donnait du poids à sa parole.
Je répondis "Non, il n'existe pas de livre sur le trempage' et décidai d'en écrire un. " Dès cet extrait reproduit en quatrième de couverture, le ton est donné : l'auteur a pris beaucoup de plaisir à composer cet essai original. Les problématiques de l'acte de tremper surgissent dès le début de l'ouvrage en un faisceau de questions :
" Trempe-t-on différemment à Paris, en province, à l'étranger ? Assembler, est-ce cuisiner ? Tremper, est-ce de la gastronomie ? Existe-t-il des recettes de trempage ?
Si vous êtes insensible à ces questions et les considérez futiles, vous ne tremperez jamais. " " Cette pratique humaine et quotidienne concerne davantage les collations que les repas ; les trempeurs exercent le matin au petit-déjeuner et au goûter vers dix-sept heures. " De quoi est donc fait ce petit ouvrage en forme de digressions, dans une pâte quasi mangeable tant sa forme incite à le saisir comme une tartine ? De mots solubles dans des boissons chaudes ou froides ? Tremper serait-il une spécificité française de l'art de se mettre à table pour le petit déjeuner, le goûter ou le souper ? Moins franchement pour le déjeuner ou le dîner. Café, madeleine, soupe.
Que signifient des expressions comme " tremper sa chemise ", " tremper la soupe ", un acier " trempé ", prendre une " trempe ", etc. L'auteur nous entraîne dans un voyage étymologique et s'interroge sur un mot qui s'est forgé au cours des siècles.
Tantôt invitation à la juste mesure : tremper pourrait signifier tempérer, tantôt affirmation virile (un caractère bien trempé), le mot a évolué dans son sens et son genre, passant du féminin au masculin.
" Dans ce dictionnaire, les records de solidité et de liquidité appartiennent pour un extrême à " Acier trempé " (quoi de plus solide ?) et pour l'autre à " Tremper son vin, par exemple avec de l'eau ", car rien de plus liquide que le trempage d'un liquide dans un autre ".
" Le plus dérangeant pour un non-Français, même francophone, restant l'expression " Tremper sa soupe ", qui consiste à verser du bouillon sur des tranches de pain ; c'est alors le liquide qui est plongé dans le solide et non l'inverse ".
Est ce une réponse à Perec qui s'interroge malicieusement sur cette expression dans son Je me souviens ?
Le texte vante les mérites des matières : de la baguette à la biscotte et n'hésite pas à philosopher sur le boudoir. Le style est vif. Parlant des croissants, Roy les qualifie d'un trait : " droit au beurre ou arqué ordinaire " ; " le chocolat fait penser à un marigot exotique, dont la tartine serait le crocodile ".
Sur la madeleine de Proust (rien ne lui échappe), l'auteur considère l'art du repêchage des miettes et on pourra se reporter au passage de La Recherche concernant l'effritement de la madeleine.
C'est un exercice littéraire jubilatoire, foisonnement baroque sur un geste quotidien, un presque rien appétissant où les mots se savourent et qui fait appel à tous les sens : la vue (cf. " le contrôle optique ! "), le goût, l'odorat, le toucher et l'ouïe.
" Son ouïe enregistre le ruissellement en cascade dans le récipient. Son toucher identifie la température, brûlante, tiède ou glacée. Son odorat décèle l'arôme du café, le fumet du chocolat, la vapeur du thé, le parfum du vin, l'odeur de la soupe. Enfin sa vue autorise l'imaginaire, car semblable à la Pierre de Rêve du lettré chinois, chaque liquide libère les mondes engloutis. " Subtil, l'auteur esquisse une anthropologie de l'acte de tremper (dont il rappelle l'anagramme : " permet ") comme un fait social total et un marqueur de distinction. Ainsi le trempage se différencie du sauçage (acte pour lequel le trempeur " a pied " dans un récipient de faible profondeur). S'il évoque la mouillette, c'est pour la mettre entre parenthèses car n'est pas tartine qui veut et la coque de l'oeuf n'a " pas de bol ".
Sucré, salé ou sacré, l'art du trempage appelle une observation fine et ne peut être assimilé sans une technique classificatoire pouvant aller jusqu'à l'esquisse typologique. Certains barèmes sont appliqués : pas de véritable trempage si l'action se fait au bout d'une pique (comme dans la fondue, mêmes les croûtons ou les morceaux de viande sont bel et bien immergés).
Le livre se poursuit par des conseils à un jeune public de trempeurs et un cours serré d'apprentissage auprès des jeunes publics.
Le livre est enfin et surtout un pastiche de ce que serait une publication universitaire et académique et il en a pourtant la teneur. Très réussi l'exercice tord le texte sur lui-même et se retourne sur plusieurs registres jusqu'à plus soif. Le jeu s'arrête ainsi comme dans un générique (de faim ?) avec des acteurs qu'on sait proches de l'auteur et qu'on imagine attablés autour de lui pour des séances en forme de leçons.
Défense et illustration de l'art de tremper à la française - l'auteur est aussi architecte et collectionneur - et il se dévoile dans une pseudo intimité comme grand amateur des manières de faire et comme grand gourmand.
Joyeuse dissertation sur l'origine et l'art de goûter, ce petit livre malheureusement inclassable mais très classieux se déguste du bout des doigts comme un mets précieux.
Les chapitres : George O. / Quid ? / Supports / Stabilisateurs / Garnitures / Liquides / Récipients / Invitation au trempage / Basse école / Haute école / Le trempage pour tous / Happy épilogue. -
Quartiers d'hiver ; ethnologie d'une saison
Martin de La Soudière
- Creaphis
- 14 Avril 2016
- 9782354280987
Ce livre de poche est avant tout celui d'un anthropologue des saisons, qui a fait de la pluie et du beau temps un de ses terrains et objets de recherche. C'est aussi la réflexion et la pensée teintée de mélancolie d'un auteur " météophile " sur une saison aimée. Son écriture relève de plusieurs registres. Tout à la fois journal d'enquête revisité (l'auteur revient sur ces pas inscrits dans les neiges des années 1970 dans le Massif Central, en Lozère, Cantal et plateau ardéchois), approche lexicale, précis de géographie climatologique et " petite philosophie de l'hiver " nourrie de littérature et de représentations.
Les " mots de l'hiver " sont analysés non seulement à partir d'enquêtes locales mais à travers une littérature élargie à tous les hivers du monde. Ainsi les façons de nommer la neige sont-elles inventoriées et l'on apprend toutes les subtilités que la langue inuit recèle pour la nommer, la qualifier, l'apprécier alors qu'un seul mot désigne le froid. Ce livre est aussi et surtout un essai d'une écriture vagabonde qui associe science et poésie, anthropologie savante (les références sont fort utiles à qui veut en savoir plus) et goût des choses simples, éloge de la paresse et de la lenteur hivernales.
Un livre à lire à plusieurs vitesses pour le plus grand plaisir de la lecture au coin du feu, sous la couette ou, pourquoi pas, sur le siège du téléski. Petit livre du goût de l'hiver, d'un auteur météo-sensible, amoureux des tourmentes, des " mois noirs ", mais aussi des beautés de la neige et des brillances de la glace aux quatre coins du monde. Le livre contient quelques illustrations en noir et blanc, volontairement " décalées " et insolites.
C'est une réédition revue et corrigée du livre L'hiver, à la recherche d'une morte saison, La Manufacture, 1987.
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Oilean Arann : une ile faite main
Beatrix Von Conta, Olivier Gaudin
- Creaphis
- Foto Creaphis
- 28 Novembre 2022
- 9782354281939
Si L'Homme d'Aran (1934) de Robert J. Flaherty a rendu mondialement célèbre la puissance d'évocation de ces paysages, Aran prête autant à l'étude scientifique et à la rêverie poétique qu'à la méditation philosophique : ses surfaces témoignent d'une domestication du monde, d'un man's land précaire, à jamais provisoire.
L'archipel d'Aran, dans la baie de Galway en Irlande, est un bout du monde occidental surexposé aux éléments. L'érosion a restreint la formation naturelle d'un sol fertile sur ces îles calcaires : leurs habitants ont dû créer de minces parcelles cultivables, délimitées par des milliers de murets de pierre sèche assemblés par gravité. Par un harassant effort collectif, à la seule force de l'énergie musculaire, humaine et animale, et avec très peu d'outils. Ce plateau de maillage de pierres est bordé par de hautes falaises. Le pourtour est ponctué d'énigmatiques « forts » d'architecture préchrétienne.
La photographe Beatrix von Conta a fait le voyage d'Aran en 2019. Elle y a poursuivi son travail au long cours sur des « paysages contradictoires », scrutant la permanence des traces du passé, relevant les signes de résistance et de ruptures inscrits dans les surfaces matérielles. Attentive aux transformations des lieux dans la durée historique, la série se confronte à la mémoire diffuse et involontaire du travail humain, omniprésente, sur cette « île faite main ». Ce livre poursuit le « questionnement sans jugement » de la photographe dans un rapport complexe à une réalité où se mêlent herbe, pierre, air et eau. Le paysage est aussi pour elle une fiction que l'image photographique rend possible. Une réalité nouvelle, offerte par le cadrage et le point de vue.
Ces pierres assemblées dans un apparent déséquilibre, auto-bloquées sans liant ni joints, sont autant des obstacles visuels que des voies de franchissement du pas et du regard. Qu'est-ce qui émeut tant dans ses photographies, et de quelle beauté s'agit-il ? Que révèlent ces paysages fabriqués de main d'homme, témoins d'une histoire ancestrale qui interroge notre relation complexe à la terre ?
En parallèle du parcours visuel, le philosophe Olivier Gaudin interroge la lente formation du territoire d'Aran, de sa géologie à ses architectures et à ses paysages. La pierre calcaire sombre se retrouve dans toutes les constructions anciennes, sans exception - habitations, églises, tours de guet, phares. Les formes des paysages sont issues d'une très longue hybridation des activités humaines avec les processus spontanés appelés aujourd'hui « naturels », mais que l'on associait tout aussi volontiers, par le passé, aux intentions de puissances autrement sauvages.
Les éditions Créaphis poursuivent avec ce livre une réflexion sur les caractères des paysages et leurs potentialités de résistance face aux menaces qui les environnent. Ce livre est un « vrai faux » guide de voyage nécessaire autant aux futurs arpenteurs qu'à ceux déjà amoureux de l'île, grâce à ces regards d'auteurs à hauteur d'oeil et pas à pas. -
L'adresse au paysage : figures de la montagne de Linck à Werefkin
Jean-François Chevrier, Elia Pijollet
- Creaphis
- 25 Mai 2023
- 9782354281953
Les auteurs proposent une lecture des représentations de la montagne depuis les dernières décennies du XVIIIe siècle - quand la moyenne et haute montagne des Alpes devient un sujet pour les peintres - jusqu'aux années 1930.
Les auteurs proposent une lecture des représentations de la montagne depuis les dernières décennies du XVIIIe siècle - quand la moyenne et haute montagne des Alpes devient un sujet pour les peintres - jusqu'aux années 1930. Tableaux, aquarelles, dessins, gravures et photographies, certains célèbres et incontournables , d'autres méconnus, plus rarement vus, mais tous de grande qualité, ont été très précisément choisis.
La montagne , une et multiple, est une formation géologique immémorielle et vivante, une entité imaginaire ettopographique, un objet d'étude et de projection fantasmatique, un milieu habité et un motif pictural inépuisable...
S'adresser au paysage suppose qu'il n'est pas qu'étendue (géographique), milieu (biologique) ou décor (d'une intrigue ou d'un récit) ; cela suppose qu'il constitue une entité suffisamment personnifiée pour être le destinataire d'une parole ou d'une pensée adressée ; on s'adresse à quelqu'un. L'idée romantique que le paysage peut véhiculer, manifester, refléter ou exprimer un état d'âme a contribué à cette possibilité d'une adresse au paysage .
Le premier ressort de l'intérêt pour la montagne qui se manifesta à l'époque des Lumières fut scientifique : ce milieu retiré et hostile, haut-lieu de l'imaginaire, matrice de mythes et de légendes, devint alors un terrain d'étude pour les naturalistes, qui s'attelèrent à résoudre les énigmes de la formation des reliefs géologiques, du cycle de l'eau, des effets de l'altitude... Les deux approches - puissance imaginaire et visée de connaissance - ont orienté également le travail des artistes confrontés aux paysages alpins. Elles constituent deux veines, deux tendances qui, souvent, se mêlent au sein d'une même oeuvre, à des degrés divers et de manière plus ou moins délibérée de la part de l'artiste. L'exposition et le livre présentent certains aspects particulièrement saillants de cette histoire.
Ouverts avec Linck, soit une pratique de la peinture accordée à une connaissance de la montagne, ils débouchent sur l'oeuvre expressionniste de la peintre russe Marianne Werefkin (1860-1938), encore très peu connue en France, dont le musée d'Ascona a consenti le prêt exceptionnel de huit grandes peintures.
Formée au grand style réaliste à Saint-Pétersbourg, elle interrompit une carrière prometteuse pour poursuivre sa quête d'un art nouveau. En 1896, elle s'installa à Munich avec Alexei Jawlensky, qui fut son compagnon pendant près de trente ans. Après l'aventure du Blaue Reiter, et la Grande Guerre, elle passa les vingt dernières années de sa vie à Ascona, qui était alors un village de pêcheurs, sur la rive suisse du lac Majeur. Déjà présent dans sa peinture, le motif de la montagne se renforce, multipliant les symboliques, parfois jusqu'à l'allégorie. Les hautes montagnes au profil caractéristique qui entourent le lac y apparaissent souvent, bien que transfigurées par la force expressive de la couleur. Elles sont à la fois des figures à part entière et le cadre de scènes hallucinées où l'être humain et la grande nature se confrontent, dans un rapport de force variable allant de la coexistence harmonieuse à l'exploitation.
ARTISTES REPRÉSENTÉS :
Giuseppe Pietro Bagetti - Louis Bélanger - Samuel Birmann - Bisson Frères - Marc-Théodore Bourrit - Adolphe Braun - Paul Cabaud - Alexandre Calame - Carl Ludwig Hackert - Victor Hugo - Pierre-Louis de La Rive - Jean-Antoine Linck - Gabriel Loppé - Frédéric Martens / Eugène Cicéri - Johann Jakob Scheuchzer / Johann Melchior Füssli - Vittorio Sella - Giorgio Sommer - Charles Soulier - Georges Tairraz (père) - Élisabeth Vigée-Lebrun - Marianne Werefkin - Edward Whymper - Caspar Wolf -
Le cimetière juif de Thessalonique
Martin Barzilai
- Creaphis
- Foto Creaphis
- 19 Octobre 2023
- 9782354282035
En 1942, les Allemands exproprient le cimetière juif de Thessalonique, alors le plus important d'Europe. Les pierres tombales seront utilisées comme matériel de construction dans la ville, par les Allemands puis par les Grecs. Le photographe Martin Barzilai est parti à la recherche de ces fragments de tombes disséminés en menant l'enquête autour de cette mémoire fantôme.
À la suite de la Reconquista, Isabelle la Catholique expulse les juifs d'Espagne en 1492. Ils sont accueillis dans l'Empire ottoman, en particulier dans les Balkans et à Salonique. Ils représentent, au xviie siècle, la moitié de la population et, jusque dans les années 1920, sont majoritaires face aux communautés grecque et turque. Dans ce contexte, les juifs de Salonique conservent leur langue : le judéo-espagnol ou ladino.
Le cimetière juif de Thessalonique est alors le plus important d'Europe. On estime qu'il contenait environ 300 000 tombes. Une grande partie des inscriptions en caractères hébraïques sur ces stèles ont un sens en ladino et non en hébreu, ce qui les rend difficilement déchiffrables de nos jours.
En 1942, alors qu'ils tiennent la ville depuis un an, les Allemands exproprient le cimetière en échange de la libération de 6 000 travailleurs prisonniers juifs, contraints aux travaux forcés. Les pierres tombales seront utilisées comme matériel de construction, par les Allemands puis par les Grecs, notamment pour l'enceinte de la nouvelle gare ferroviaire et dans un grand nombre d'autres chantiers. Aujourd'hui, on les retrouve à travers toute la ville et au-delà.
À cet effacement culturel, s'ajoute la destruction physique de la communauté. En effet, c'est à partir de février 1943, que furent appliquées les lois de Nuremberg imposant le port de l'étoile jaune et les restrictions de circulation. Les déportations eurent lieu entre mars et août 1943. Environ 54 000 juifs de Thessalonique furent exterminés, soit 96% de la population juive de la ville. Seule la communauté polonaise connut un taux d'extermination plus important. La plupart des juifs saloniciens furent gazés dans le camp d'Auschwitz Birkenau.
Le photographe Martin Barzilai s'est rendu à plusieurs reprises à Thessalonique depuis 2018, à la recherche de ces fragments de tombes disséminés dans la ville, de ce qui a été rendu invisible, ces traces qui ont résisté au temps. De cette enquête il en a aussi tiré un journal et des entretiens avec des personnes concernées par cette mémoire fantôme.
Deux historiennes interviennent en contrepoint pour éclairer cette histoire : Kate?ina Kralova et Annette Becker.
Quelles sont les traces de ce passé dans la ville et dans les mémoires ? Comment se manifeste cette présence fantomatique qui articule, dans un même lieu, présence et disparition ? Comment est-elle perçue par les habitants ?