On écrit un poème pour embrasser. Celle à qui s'adresse le baiser fait corps avec les mots. Une lectrice imaginaire laisse battre son coeur au rythme des mains qui enlacent. En fermant les yeux, une autre nudité se confond aux saisons du paysage. Le corps s'inonde de voyages sous la pluie, de moussons salées comme des marées hautes. Au bord du livre comme au bord du lit, un amour ouvre plus de fenêtres que toute la lumière du matin.
Récit en proses poétiques né lors d'une insomnie, la nuit de la Saint-Valentin. Il s'agit d'une conversation avec une robe. Ce texte cousu à l'endroit à l'envers invente une doublure au manque pour rendre supportable la douleur. Chaque prose imagine une photographie à laquelle s'adresse notre solitude.
J'ai vendu mes larmes comme de la confiture, de l'eau bénite, des preuves de ma gentillesse ou de ma bonne foi. Je me suis fait à l'idée que ça pouvait devenir une carte à jouer, une passion, voire un métier. Qu'on me ferait une petite place quelque part. Avec certificat d'authenticité.
« Le beau guérit. Certaines philosophies l'affirment et l'attestent. La poésie l'enclenche. Il faut entendre par beau des liens qui n'existaient pas. Ce qui surgit dans le regard nous déplie, nous décrispe vers cet espace, interstice entre l'âme et le corps, où s'ouvre, dans le poème, non comme une issue de secours, mais plutôt une porte vers l'ici maintenant. En trois seuils, cette quête dans le livre passe par l'atelier d'un peintre. Puis l'atelier du mot. Et enfin l'atelier de l'autre.» Dominique Sampiero.
Onze nouvelles comme onze feuilles d´un livre d´automne, Dominique Sampiero nous emmène dans le noir et blanc d´une fête de village, dans un train avec sa fille ou avec son père et aux côtés d´une femme en larmes qu´il regarde, fasciné, impuissant. Il nou
Trois nouvelles, trois personnages - une femme à la fenêtre statufiée dans le silence, un clochard céleste, un exilé de Casablanca qui danse avec l'alcool et ses fantômes - et un ami commun : le pain perdu. Ces trois tranches de vie sont pétries de secrets d'humanité et d'espoir. Comment trouver les mots quand on est privé de mots ? À quoi bon avoir la vie éternelle si c'est pour finir sans amis ? Peut-on vivre loin de ses racines ? Avec tendresse, au plus près de la fêlure de ses magnifiques personnages, Dominique Sampiero nous transporte, dans une langue cristalline où tout fait sens et signe.
Dans l'univers de Dominique Sampiero, la naissance et la mort sont intimement liées, comme le cycle des saisons.La lumière du deuil est le portrait d'une jeune femme seule, enceinte, qui chante la lumière, la nature, mais aussi la peur, le désespoir et la mort. Qui était donc cette femme que le narrateur n'a même pas connue et qui lui manque ?Dans Le dragon et la ramure, Justin, un orphelin élevé par des moines, apprend l'art de l'enluminure, puis abandonne la vie monacale pour vivre auprès d'Agate des jours de joie et de ténèbres et connaître la rédemption par l'amour.Deux courts récits d'une rare densité.
Voilà déjà plusieurs jours que la maman de Malika, 13 ans, n'est pas rentrée à la maison. Comme d'habitude, l'adolescente assume comme elle peut Malvina, sa petite soeur de cinq mois. Le papa n'a plus donné de nouvelles depuis qu'il est parti, à la naissance de la deuxième. Les vacances arrivent. Malika doit partir à la mer avec le centre social et tous ses copains. Mais Maman est toujours en fugue. Tant pis ! Elle part quand même. On comprend vite qu'elle n'a pas abandonné Malvina. La suite s'écrit comme une aventure faite de péripéties joyeuses, salées, amères parfois. Car seul l'un des deux parents reviendra s'occuper des fillettes.
La vie est chaude. Ce livre de Dominique Sampiero est porteur d'un paradoxe. Le titre en est simple, volontairement apaisant, mais son contenu évoque une réalité qui génère des peurs : la mort. Dans ce recueil où alternent de courts poèmes et des passages en prose, l'écrivain réunit en réalité deux mystères : la nuit et la mort. « J'ai voulu qu'ils se frôlent, confie-t-il, qu'ils se touchent, à travers la fenêtre ouverte du livre. Comme ils le font déjà dans la vie. Et d'ajouter, dans un mouvement qui justifie le titre du recueil : « je crois sincèrement que la poésie peut nous réconcilier avec ce qui nous fait peur. » Que le jour laisse place à l'obscurité, que la mort succède à la vie donne de la valeur à notre existence :
L'amour est l'or qui ouvre en nous les portes du soleil.
«Depuis sa naissance, il est malade des nerfs. Le rebutant fait des crises. Il est allé dans trop de centres. Ça lui a porté malheur. Il a des problèmes avec les flics, avec la justice. On l'a bourré de médicaments. Ça lui a porté malheur. Des amis il en a pas. Il leur a prêté de l'argent. Ils ne lui ont jamais rendu. À force de se boucher les oreilles, il n'entend plus les conversations.» Dominique Sampiero.
Il n'y a pas de mot pour désigner l'absence de l'enfant lorsque, les parents séparés, il part vivre avec l'un plutôt qu'avec l'autre. De cette perte, de ce manque, Dominique Sampiero fait un livre : journal sentimental d'un père privé de sa fille, égaré dans sa douleur, « en équilibre sur un trottoir, entre la bordure et le vide », élégie de l'homme qui « marche à côté de (sa) dépression comme à côté d'une rivière » ; récit du quotidien qu'il faut cependant affronter car il est souvent le meilleur des remèdes - « tout est mort, chaque matin, mon ancienne vie pourrit doucement, j'hésite entre dormir et dormir, puis finalement le ciel, avec ses trouées bleu cristal, me donne envie d'un café noir. Je prends une douche, je file à Auchan » - ; châsse de souvenirs, où les moments passés avec l'enfant font ressurgir l'enfance du père ; poème lyrique à cet être qui s'éloigne et laisse les lieux « tristes comme une lampe sans chevet », hommage à sa « petite présence » : « Depuis ton départ, j'ai décidé de te parler chaque jour à voix haute, comme dans un refrain, les bribes d'une chanson, de tenir à toi, en secret, dans un jardin de toboggan et de ducasse, quoiqu'il arrive, du matin au soir, au-delà du raisonnable »...
Depuis les premières heures de la séparation, puis mois après mois, durant un an, au fil des saisons et de leurs couleurs changeantes, Dominique Sampiero raconte, entre prosaïsme et poésie intime, le deuil d'une famille unie, le courage et la lâcheté, les joies et les peines, la solitude infinie et les retrouvailles au rythme des week-ends, la complicité plus forte que tout : le difficile cheminement d'un homme vers une vie nouvelle, pourvu qu'il accepte qu'elle soit la sienne.
Parler de dieu, du silence, de la mort, de la lumière, du vide ou de la vie éternelle est un pari impossible. À part dans le doute et le bégaiement. Et pourtant tous les poètes s'affrontent à ces questions. Et nous bégayons les thèmes qui se répètent depuis des siècles. Ce texte est né d'un journal et d'extraits structurés sur trois années d'écriture qui explorent méthodiquement ce bégaiement comme un tournoiement de la pensée pour trouver appui. Il compte parmi les plus intimes et les plus émouvants de Dominique Sampiero. Bégaiement de l'impossible et de l'impensable est le dernier volet d'une trilogie formée avec Carnet d'un buveur de ciel, et Le maître de la poussière sur ma bouche.
C'est dans un jardin en ruine que je retrouve riri, chaque soir, même l'hiver, après le collège, à dix-huit heures tapantes.
Nous marchons à la rencontre l'un de l'autre comme deux voleurs puis nous déguerpissons à gauche dans une ruelle herbeuse, un coupe-gorge bordé de plaques de ciment, un sentier qui donne sur le plus grand et le plus sauvage des jardins de la ville : les remparts. c'est notre salon d'été ou d'hiver, notre cabane de trappeur, notre igloo, notre hutte, notre grotte ou notre caverne secrète. on s'invente des histoires à partir du craquement d'une branche ou du cri d'un oiseau.
On se raconte des trucs qu'on n'ose dire à personne et puis on rentre chez soi en se serrant très fort la main : à demain matin huit heures pour partir à l'école. dors bien, sinon, rendez-vous à la fenêtre avec la lampe !.
" J'ai travaillé trop tard hier soir.
Ecrire me crée. Me tue. Je suis un voleur. Les petits pleurent un peu au début. La classe est propre et claire. Elle les menace. Et pourtant ils entrent. C'est le premier pas qui compte. Je ne suis ni leur père ni leur mère. Et parfois je me sens tout ça. Ils sont si près de moi que je ne les vois pas. Je fais comme eux. J'entre. Ce miracle se renouvelle tous les jours. Pourquoi n'ai-je pas claqué la porte et ne suis-je pas parti en courant ? Non, je ne pars pas.
Je suis le ver dans le fruit. Je mange la pomme et crache cette mousse. Lorsque le temps appartient à la décision de l'autre, non seulement dans l'enfance, mais dans l'enfance du monde, l'autre a peur du vide et remplit les êtres qui l'entourent de sa propre folie. C'est le vol, le viol de l'enfance : le temps dérobé. "
Dans les marges des textes saints, un moine mêle les monstres aux feuilles de Paradis.
A ces enluminures, il ajoute une histoire - d'amour et de mort -, comme une parabole, mais qui ne livrerait aucun enseignement, sinon en creux. Qui saurait dire si, par son ultime et terrible geste, son héros fut un juste ou bien la proie de Satan ? Noce paysanne en terre de Flandre, les travaux et les jours, une nature extrême : la splendeur du simple se dit avec retenue, pourtant dans l'exubérance, la tendresse naïve, les mots crus de l'enfance.
Le malheur, sous la forme d'une famine, y fait entendre des accents jamais allégoriques : c'est la chair qui parle, qui crie. Mais ce livre est avant tout un chant païen, qui célèbre avec ferveur les effusions lumineuses de la matière, la beauté des corps quand leur dénuement les rend présents à l'éternité.
Vence, 1954. Au soir de sa vie, un homme se souvient de son histoire, celle d'un peintre génial qui s'est nourri des sensations de son enfance, de la peur de l'obscurité pour construire un monde lumineux et magique. D'abord en lutte, il accepte progressivement l'idée de la mort, grâce au soutien de Lydia, son modèle et sa maîtresse. Un portrait croisé de Matisse. Premier roman.
«Un journal ne sert à rien. Il s'agit de l'écrire une fois. Et c'est pour toute une vie. Une seule année suffit. On tombe ensuite dans le cliché, le pléonasme. La redondance de soi. On s'enferme, on se singe. Je retrouve mes larmes comme mes propres enfants, le plus fragile de moi-même ne m'effraie plus, au contraire, je me laisse envahir, et la pluie, au-dedans comme au-dehors, lave ce que je ne sais ni de moi ni du monde, et qui me brûlait le coeur.» Dominique Sampiero.
«L'acteur de tous les jours prend la lumière du matin entre ses doigts et façonne les heures de sa journée, de ses outils, les saisons, les petits comas de sève et de rivière, les pluies comme des draches, comme ça, l'air de rien, presque par distraction et pour inventer, oublier le temps, en même temps. L'acteur de tous les jours est le visage que l'on prend de plein fouet, comme une gifle, le baiser d'une inconnue, une averse glacée, puis la chaleur qui vient après, et surtout, le sentiment inouï d'entendre les yeux, les sourcils, la bouche, les cheveux, le nez, les joues, le front, raconter doucement une histoire...»Dominique Sampiero.
Ecoutez cette écriture naufragée.
Mais doucement naufragée. Sainte horreur du poème pour faire dire au poème tout ce qu'il ne peut dire. Pour le hérisser en scintillements d'impossible. Sainte horreur, sans doute, de tout poème qui ne serait pas ce lâcher-prise où la langue se délivre d'elle-même. Ecoutez. Pas de round d'observation. Les mots poussent de toutes parts, entre étoiles et poussière. Le poème ? Pur désir de vertige, au plus amoureux de la langue.
La parole ? Une vraie chair d'esprit, en prise sur toutes les brèches. Le monde ? Une chambre des souffles. Oui, écoutez cette langue ouverte, cette langue qui veut s'ouvrir entièrement. S'ouvrir à nos âmes fripées, à nos sexes déchirés, à nos voix blessées. Z. B.
Patience de la blessure est sans doute le texte le plus profond, le plus intériorisé de Dominique Sampiero. Il cerne cela même qui fait oeuvre chez lui, l'écriture, dans ce qu'elle a de plus urgent, de plus fragile et de plus opératif. Blessure d'écrire, blessure du regard, blessure du corps, il y a tout à la fois lâcher prise et resserrement, patiente quête d'une jointure improbable entre le clos et l'ouvert, l'absence et la présence, la lumière et les ténèbres, la chair et l'esprit, l'instinct et la pensée, la fusion et la séparation.
Ce long poème en prose est un retour à l'écriture fondatrice de Sampiero d'où surgit avec cette violence sauvage et cette beauté singulière qui lui sont propres une oeuvre qui met en abîme et qui secoue.
« Le dieu des femmes » est le titre des carnets intimes d'un vieux célibataire, David, reclus dans une solitude quasi totale, et qui s'interroge sur la puissance de ses conquêtes passées. Dans un quotidien fait d'égoïsme, de futilités et de résolutions raisonnables mais purement imaginaires, ce sexagénaire cocasse craint de perdre sa vigueur physique et intellectuelle. Ponctuée de préceptes taoïstes et des souvenirs érotiques les plus torrides, son existence intérieure voudrait, à tort, combler le vide de ses jours. En vain.
Car il n'y a pas de « dieu des femmes », et sans doute les pages que David croit noircir, immortalisant ses amours glorieuses, restent-elles blanches. C'est ainsi du moins que les découvrira par hasard Ernestine, sa femme de ménage et peut-être - mais le sait-il ? - la seule femme de sa vie... Ont-elles même existé, ces créatures dont le doux rêveur décrit les corps jusque dans leurs recoins les plus intimes ? Il en est pourtant une, Clara, qu'il rencontrera, pour l'accompagner au seuil de la mort et découvrir, enfin, ce qui endeuille sa propre vie...
Voici, en un alliage étonnant de prosaïsme et de poésie mystique, d'érotisme et d'impuissance, de dérision et de tendresse, de profondeur et d'étrangeté, un roman qui touche à la vérité de l'amour.