Féministe, socialiste et pionnière de l'avant-garde cinématographique des années 20-30, Germaine Dulac (1882-1942) a en effet joué un rôle crucial dans l'évolution du cinéma comme art et pratique sociale dans la France de l'entre-deux guerres. Au-delà de ses écrits théoriques ou critiques et de son combat passionné pour la légitimation du cinéma comme art, elle est l'auteure d'une trentaine de films de fiction (1915-1930), et d'autant de films d'actualité et de documentaires (1930-1936). Toutefois, la connaissance de son oeuvre est restée limitée à deux ou trois films, notamment la Fête espagnole (1919) d'après un livret de Louis Delluc, La Souriante Madame Beudet (1923) d'après une pièce d'André Obey, et La Coquille et le Clergyman (1927) d'après un scénario d'Antonin Artaud. L'ouvrage constitue la première collection française de textes critiques et historiques sur cette grande figure de la création cinématographique au féminin. Les articles portent sur la diversité de l'oeuvre et des activités de Dulac, sur son huma-nisme, son expérimentalisme, sur le rapport aux autres arts, sur une pratique constamment inventive faisant de son oeuvre une oeuvre de passion ; mais aussi sur la mise en scène des corps, sur le théâtre des rôles identitaires et sexuels, sur le rapport à l'histoire et les attitudes militantes.
Le numéro 96 de 1895 revue d'histoire du cinéma (printemps 2022) est largement consacré au cinéma des premiers temps et à la culture spectaculaire au tournant des XIXe et XXe siècles. Le cinéma héritera des spectacles scéniques à l'extraordinaire inventivité comme des attractions des foires telle celle de Gand. On examine en outre les lieux où se voient les bandes du premier cinéma (cafés, magasins Dufayel) étudiés à partir d'archives inédites. Ainsi le cabaret du Néant et ses attractions macabres, les programmes du Cinématographe-Lumière (puis le Select) qui introduisent un montage de vues ouvrant à la narration. En dehors de cet ensemble, un entretien avec une exploitante de cinémas d'art et d'essai mais aussi de salles X, Simone Lancelot, et la correspondance de François Truffaut et de ses lecteurs ordinaires ou célèbres qui le lisaient dans Arts-spectacles et lui écrivaient soit pour le soutenir, soit pour l'apostropher. Dans la rubrique des Chroniques nombreux comptes rendus d'expositions, de livres et de DVD.
Au sommaire : F. Albera, «Le détour par Caravage» ; L. Le Forestier, «Comment peut-on encore être "cinémato-barthésien" ? Quelques réflexions sur Barthes, l'Histoire, le cinéma» ; M. Aubert, «Les nouvelles perspectives d'accès aux collections des Archives françaises du film du Centre national de la cinématographie». Suivent les rubriques comptes rendus de livres, notes de lecture et nouvelles sur l'actualité.